News & Last Entries
Agenda
Lettre de Kobad Ghandy
Kobad Ghandy, a plus de 60 ans et est un membre du Politburo. Il a été arrêté à Delhi en 2009. Il était chargé des publications du parti et écrivaient des éditoriaux sous le pseudonyme de ‘Azad’. Il est accusé par les autorités d’être impliqué dans des activités anti-nationale et d’être un membre actif de la guérilla opération dans diverses régions du pays. Il est également accusé, entre autres choses, de travailler à l’instauration d’une base urbaine du parti à Delhi. Incarcéré en vertu du Unlawful Activities Prevention Act, il aurait pu être condamné à la peine de mort ou à la prison à perpétuité. Mais en 2012, la Supreme Court a abandonné les charges de terrorisme contre lui, faute de preuves. Il est néanmoins toujours en prison, accusé dans diverses autres affaires. Il est malade, souffrant d’un cancer sévère, mais les autorités pénitentiaires lui refusent régulièrement les soins nécessaires à son état, lequel se détériore de jours en jours. Il est donc toujours détenu à la Tihar Jail de Delhi, laquelle est composée de neuf quartiers distincts.
Il a écrit cette lettre à la mi-juin, néanmoins, mais elle n’a été rendu public que plusieurs semaines plus tard. Néanmoins, il nous semble important, à quelques jours de notre journée internationale de soutien aux prisonniers politiques indiens, de vous en proposer la traduction, d’autant plus qu’elle souligne l’importance de notre mobilisation.
Cette lettre pour tous tellement vous remercier pour le soutien que vous m’avez montré, de tant de manières, contre le harcèlement auquel j’ai été confronté ces neuf derniers mois en raison des transferts routiniers tous les trois-quatre mois.
Cette méthode de transferts routiniers est une arme notoire de harcèlement (auparavant utilisée comme une forme de punition), d’autant plus à mon âge, avec toutes mes sérieux maux. On peut dire que l’intention était, consciemment ou inconsciemment, de m’handicaper, ou même pire, de s’assurer que je n’en sorte pas vivant. Et m’envoyer à la Jail-8, qui dispose des pires conditions de vie de tous les quartiers de haute sécurité (et du taux maximal de décès comparé aux autres neuf quartiers) est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.
Bien que ma santé était déjà fragile, je n’avais d’autre alternative que d’avoir recours à la grève de la faim, étant donné que tous mes appels à cet égard depuis l’an dernier (et ceux pour être transféré dans le quartier des personnes âgées depuis trois ans) n’ont jamais été entendus. C’est votre action prompte, à tous, qui les a fait me renvoyer dans ma précédente cellule, ce qui a empêché un déclin de mon état santé devenant irrémédiable.
Le sixième jour de ma grève de la faim, le 4 juin, mon état s’était grièvement détérioré. J’étais continuellement pris de vertiges et nauséeux, ma tension avait chuté, j’avais déjà perdu six kilos et même deux bouteilles de perfusion intra-veineuse ce jour-là n’avait pas beaucoup aidé. Le soir même, j’ai senti que ma santé pourrait ne pas pouvoir supporter cet effort beaucoup plus longtemps.
Mais par chance, ce même soir, le directeur (de Jail-9, dont tout le staff s’était montré préoccupé de ma santé) m’a dit que j’allais immédiatement retourné à la Jail-3. Cette fois, on m’a donné toute l’aide nécessaire, je suis retourné dans ma précédente cellule (qui dispose d’équipements) à la Jail-3. Il était 21h30 et c’est alors que j’ai rompu ma grève de la faim avec de la nourriture que mon donné détenus.
Des résultats si rapides auraient été inconcevables (même si je ne suis pas encore sûr de ne plus être transféré à l’avenir) sans votre formidable soutien à l’extérieur, et la prise de conscience des autorités pénitentiaires de l’étendue de l’inhumanité impliquée. Bien que le directeur général des prisons semble être un être humain (un moins plus tôt, il était intervenu positivement dans une plainte concernant mes problèmes de santé), les procédures bureaucratiques, telles que ce genre de transferts, le fonctionnement automatique, sans aucune considération pour les individus, qui ne sont que des numéros de telle manière qu’un petit bandit de 25 ans et moi sommes mis sur le même plan.
Je vous remercie tous très fort pour mon retour rapide. Des remerciements spéciaux doivent être adressés, d’abord et en tout premier lieu, à ceux qui ont aidé à faire passer le message (détenus et autres), ensuite, aux avocats qui se sont démenés, troisièmement aux journalistes, particulièrement ceux qui ont aidé à faire de ceci une histoire humaine et sociale au niveau national (me dit-on), quatrièmement, et c’est le plus important, à mes parents et amis qui ont montré une inquiétude et une préoccupation rarement vue, et enfin, à tous les nombreux soutiens silencieux (et pas si silencieux) qui ont permis aux gouttes de soutien de devenir un océan de sympathie.
Enfin et surtout, bien que je doive encore savoir ce qui s’est ébruité à l’extérieur, un remerciement particulier au PUDR qui a dit avoir négocier un accord. Bien sûr, il se peut que pendant un certain temps, je ne sache pas ce qui s’est passé, comme j’ai découvert qu’ils avaient interrompu mon droit de visite pendant quinze jours (pour la toute première fois) et qu’un représentant du PUDR s’était fait remballé aux portes de la prison le mardi 9 juin. Ceci n’est pas de bonne augure (on m’a dit cela lors d’un appel téléphonique le lendemain) et donc, votre soutien sera probablement nécessaire à l’avenir. Mais, pour l’instant, une solution pacifique à un problème douloureux a été trouvée, dont je connaîtrai les détails plus tard.
En attendant, l’affaire me concernant à Delhi se prolonge, et je n’en vois pas le bout ; peut-être les avocats et la magistrature de Delhi devrait-ils s’inspirer du film marathi ’Court’.
Kobad Ghandy
Tihar Jail - 3
12 juin 2015, New Delhi
PS : Le 11 juin, l’office de justice a visité notre quartier et m’a verbalement assuré que je ne serais pas transféré ; mais ici, les assurances verbales ont besoin d’une confirmation supplémentaire.